Une bien vilaine grippe

L’Institut français de veille sanitaire a fait le point, fin mai, sur l’épidémie de grippe traversée cet hiver. Le virus A(H3N2) n’a pas été tendre avec les plus âgés. 47% des 3.133 hospitalisations pour grippe sont intervenues chez des plus de 65 ans. Chez nous, l’ISP promet les statistiques pour mi-juillet.

L’Institut national de veille sanitaire (InVS) parle d’épidémie « forte », dominée à 55% par le A(H3N2), ayant duré en France neuf semaines et occasionné 2,9 millions de consultations en médecine générale pour syndrome grippal. Au pic de la flambée chez nos voisins (début février), près d’un quart des visites de SOS Médecins étaient attribuables à la grippe.

Du côté des hôpitaux, on a dénombré près de 30.000 passages aux urgences pour grippe, dont un bon 10% (3.133) se sont soldés par une hospitalisation. Ce sont les 65 ans et plus qui ont été le plus fréquemment « gardés »: 28% de ces hospitalisés appartenaient à la tranche d’âge 65-84 ans, 19% avaient passé les 85 ans. Ces groupes d’âge représentent respectivement 15% et 3% de la population française – en d’autres termes le pays a connu un risque d’hospitalisation multiplié par 2 pour les 65-84 ans et par 6 pour les 85 ans et plus, schématise l’InVS.

L’impact sensible de la grippe 2014-2015 sur les plus âgés s’est également fait sentir au niveau des admissions en réanimation et dans les collectivités pour personnes âgées. En effet, le nombre de cas de grippe sévère admis en réanimation a été très élevé (1.558) et quasi la moitié des patients concernés (48%) avaient 65 ans et plus. De même, 1.328 cas groupés d’infections respiratoires aigües en collectivités de personnes âgées ont été signalés au cours de la saison grippale. Il s’agit, précise l’InVS, du total le plus haut depuis la mise en place du dispositif de surveillance en 2006.

La Belgique fait les comptes

Les experts estiment qu’il y a eu un excès de 18.300 décès toutes causes pendant l’épidémie saisonnière, concernant à 90% les sujets âgés de plus de 65 ans, lié à la grippe et à d’autres facteurs hivernaux. Il s’agit de l’excès de mortalité le plus notable depuis l’hiver 2006-2007. Cette surmortalité n’a pas touché que la France. « Elle a également été observée dans 13 des 15 pays participant au projet européen de surveillance de la mortalité hivernale », commente l’InVS. Il a été estimé à 90.000 décès tous âges confondus. La Belgique, à en croire l’organisation sanitaire française, compte parmi les pays participants chez lesquels un excès de décès a été repéré. Au moment d’écrire ces lignes, notre Institut scientifique de santé publique (ISP) maniait encore la calculette ; il ne nous a donc pas fourni de détails. Il annonce les chiffres nationaux pour le 15 juillet environ.

La vaccination en berne

L’InVS s’alarme par ailleurs de la baisse continue de la couverture vaccinale dans les populations à risque: il déduit des données de l’assurance maladie que seuls 47% des Français à risque étaient vaccinés, contre 49% la saison d’avant. « Cette baisse affecte surtout les personnes de 65 ans et plus (48% versus 52% en 2013-2014) alors qu’elle se maintient à 38% pour les populations à risque de moins de 65 ans. » Une évolution qui inquiète les autorités de santé car, même si cette année l’adéquation du vaccin n'était pas optimale, la majorité des virus grippaux circulants n’en étaient pas moins couverts par ce dernier.

Ce n’est apparemment pas dans les établissements d’hébergement pour seniors que la vaccination a flanché: la couverture vaccinale des résidents français était de 83%, une « valeur comparable à celles observées depuis 2010-11. » Ce statu quo, à un pourcentage honorable, peut expliquer que les proportions de malades, d’hospitalisés et de décès parmi les résidents ne s’écartent pas de ce qu’on a pu observer précédemment, commente l’institut. « La mise en place de mesures barrière (renforcement des mesures d’hygiène, isolement des malades, limitation des visites…) a pu également contribuer à cette protection. » En revanche, la couverture vaccinale du personnel de ces collectivités reste faible: un peu moins d’un quart (23%).

Ces statistiques ont amené le mouvement de médecins généralistes MG France à déclarer sur son site qu’il était nécessaire « d'organiser une politique de prévention pilotée à partir des cabinets des généralistes: la vaccination doit s’inscrire dans un parcours organisé et coordonné par le médecin généraliste traitant, pour lui donner la traçabilité nécessaire et éviter une dilution des responsabilités ».

J.M.

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